Au pays des histoires, vivaient quatre enfants.
L’un connaissait la pluie, les fontaines et le vent, et savait raconter, de la mer, les histoires. De celles qui font pleuvoir, et le sel, et l’espoir. Il savait qu’au delà de la mer et des eaux, se cachait un trésor qui portait un manteau. Un manteau de rosée, un manteau blanc d’écume pour les jours sans vie, les nuits privées de lune. Il savait transformer, en gouttes scintillantes, les tristes émotions et les douleurs fumantes.
L’autre, quant à lui, savait le désert, l’aride et le vent, aussi, mais le père. Le vent sec et froid qui pique à la face, le vent chaud du sud qui fait les grimaces. Il savait le souffle sur la peau gercée, la peur dans le ventre, le sable enlisé. Il contait au soir, coyotes hurlants, la joue caressée, le bruit du serpent. Il domptait la peur dans chaque poème, de cette terreur qui dedans s’égrène et fait frissonner, même en terre brûlante.
Le troisième enfant savait attiser le feu de la terre, dans l’antre enfermé. Le feu, disait-il, est une embellie, quand, au cœur des hommes, il ôte folie, et fait rayonner, en un brasier clair, les rêves et les Dieux, les chants et les frères. Il savait la flamme qui brûle la chair et celle qui fait de l’ombre, lumière. Dans ses yeux ardents brillait l’étincelle, qui fait s’éveiller la chaleur charnelle et, au fond des cœurs, le désir brûlant, chez ceux que la peur délaisse un moment.
Et le quatrième, Sorcier entre tous, connaissaient les herbes, les pierres et la mousse, les forêts paisibles, les arbres tordus, la liqueur de cidre, le fruit défendu. De glaise et de boue, avançait matin, entre deux bosquets, un chêne à la main. Il savait le chant des feuilles sauvages, les mots de la terre, le cri des nuages. Il savait prédire, entre deux chemins, celui tout de bon et l’autre malin. Les vers, qui luisaient, racontaient ses pas aux marcheurs perdus, en quête de joie.
En ces quatre enfants, aux confins des mondes, se baignait la vie, rythmant ses secondes. À leurs cœurs chantant, elle venait conter les puits de sagesse qu’elle avait portée. Et c’est au matin, quand tous repus, qu’enfin repartait comme était venue.
Les enfants sauvages buvaient à ses mots et les distribuaient, en précieux cadeaux, autant que leurs voix pouvaient murmurer à l’oreille des hommes, de rêves embrûmés.
Que le vent se meure, que la terre implose, que le feu s’éteigne en la mer morose, ces enfants bénis portent les histoires, qui savent au monde redonner l’espoir.
Ecoutez-les bien quand au soir venu, le souffle murmure sur votre peau nue, quand au coin de l’âtre crépite l’envie, quand, dans votre bain, vous lave la pluie. La terre sous vos pieds raconte, elle aussi, les mots des enfants qui n’ont pas vieilli.
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